Les fusains persistants et panachés

Le choix traditionnel en matière de buissons persistants est souvent peu inspiré et se limite aux buis (malheureusement devenus un très mauvais choix), aux ifs, aux rhodos et éventuellement aux houx. Il existe cependant de nombreuses autres possibilités rendues possibles par l’adoucissement du climat. Les persistants sont indispensables pour donner vie et structure au jardin en hiver, tout en créant des refuges précieux pour la petite faune du jardin. Les fusains persistants proposés dans le commerce appartiennent généralement à 2 espèces: Euonymus japonicus, arrivé en occident au 19ème siècle et Euonymus fortunei, nommé pour le botaniste britannique Robert Fortune, également asiatique. Faciles quant au sol et à l’exposition, résistants à la sécheresse et naturellement ordonnés, les fusains persistants offrent beaucoup d’intérêt, à condition de les placer avec discernement. Voici quelques usages envisageables.

Euonymus japonicus: en buisson ou en haie

Le fusain du Japon type a un beau feuillage vert et luisant, au bord finement dentellé. Comme les fusains caducs, ils produit de petites fleurs vertes, suivies de capsules en forme de bonnet d’évêque renfermant de belles arilles orange vif. Dans un climat favorable il peut former un buisson de 4 m de haut. Un très grand nombre de cultivars ont été développés et se trouvent dans le commerce, au point que le choix est difficile car beaucoup se ressemblent. Une série appelée ‘Microphyllus’ a des feuilles beaucoup plus petites et ressemble très fortement au buis, qu’il peut remplacer avantageusement. Il pousse naturellement en forme arrondie mais peut aussi se tailler en topiaire. Euonymus japonicus ‘Microphyllus Green Rocket’ a un port très élancé.

La course pour produire de bons remplaçants pour les haies de buis a rendu le horticulteurs très créatifs. Tout comme les Ilex crenata, les fusains persistants à petites feuilles font bien l’affaire. Dans les verts unis, Euonymus japonicus ‘Green Spire’ (photo) est fréquemment utilisé. Le cultivar ‘Jean Hugues’ est peut-être celui qui ressemble le plus au buis, en voie de devenir l’ersatz par excellence de cette plante souffreteuse. ‘Tom Thumb’ (le Petit Poucet anglais) est une bonne version naine.

On trouve aussi un large choix à bords blanc ou or, notamment à petites feuilles, comme Euonymus japonicus ‘Microphyllus Aureomarginatus’ et ‘Albomarginatus’. Réfléchissez cependant à deux fois avant de planter toute une haie d’une variété panachée: non seulement cela peut être visuellement fatiguant, mais de plus cela ne met pas en valeur les autres plantations.

Je vois quelques exemples autour de chez moi: des fusains panachés de blanc plantés en masse et taillés devant une maison ou une variété or plantée en blocs dans un parking.

Vous noterez que les variégations ne sont pas toujours stables: des branches toutes vertes ont tendance à revenir et des rameaux complètement jaunes ou blancs peuvent aussi apparaître. Ce phénomène spontané explique pourquoi tant de cultivars différents ont pu être produits.

Utilisé en grand buisson dans une haie mélangée ou dans un fond de jardin devant des arbustes sombres (ifs et houx dans ce cas-ci), Euonymus japonicus peut être particulièrement utile et lumineux. Le fait qu’il supporte la mi-ombre et un sol sec permet de le planter sous les arbres; une situation toujours difficile. J’aime particulièrement ‘Président Gauthier’ , un cultivar aux feuilles assez grandes et arrondies qui peut aisément atteindre 2,50 m en tous sens. Les rameaux bien denses et assez courts sont une mine précieuse pour les bouquets en toute saison. Il y en a beaucoup d’autres. Lisez attentivement les étiquettes pour estimer la taille définitive de la plante.

Euonymus fortunei en couvre-sol ou en grimpant

Le fusain de Mr. Fortune, est plutôt une plante tapissante, qui peut produire des rameaux de plusieurs mètres. De petites racines se forment sur les tiges et s’enracinent au fur et à mesure. Introduit comme couvre-sol, Euonymus fortunei s’est répandu dans la nature aux Etats-Unis où il est considéré comme une espèce hautement invasive, partant même à l’assaut des arbres. Le feuillage est petit et ovale et le port souple. Chez nous, ce sont surtout des sélections aux feuilles panachées qui se vendent, dont le classique ‘Emerald and Gold’, ‘Harlequin’ moucheté de blanc, ‘Emerald Gaiety’ bordé de blanc ou ‘Blondy’ aux feuilles jaune clair bordées de vert. Les feuilles prennent parfois des tonalités roses en hiver. L’utilisation principale est en couvre-sol mais on peut aussi tailler les jeunes plantes en petite haie.

Si au départ il s’agit d’une plante rampante, elle part à la verticale dès qu’elle trouve un support. Tout comme le lierre, et bien que n’ayant aucune parenté, ce fusain a une phase juvénile où il produit de long rameaux. Une fois établi en hauteur, il passe à une phase adulte où il se lignifie et produit des fleurs puis des fruits. Ici, une variété or s’est enfilée dans un buisson taillé de jasmin d’hiver. Comme celui-ci produit de petites fleurs jaunes sur le bois nu en hiver, l’effet n’est pas trop mal. Dans la deuxième photo, un fusain s’est emmêlé avec une clématite contre le mur.

Euonymus fortunei est à mon sens une plante précieuse pour une façade, n’ayant absolument pas les défauts du lierre. Un peu de grillage ou une treille permettra le démarrage. Ici, j’ai planté une sélection panachée de blanc au pied d’un grand rosier qui devenait dégarni à la base. Le fusain s’y est enfilé tout seul. Les rameaux latéraux restent courts et aucune taille n’est réellement nécessaire.

Au mois de juin, ce fusain se couvre de petites fleurs et est intensément butiné. Les capsules blanches laissent paraître les arilles oranges en fin de saison, mais disparaissent dans la masse du feuillage. Bien dense et branchu, ce grimpant est très prisé par les oiseaux pour y construire leur nids. Les merles en particulier y trouvent le gîte et le couvert.

Quand on commence à jardiner, on est souvent très attiré par les feuillages bariolés. Modérez vos ardeurs! S’ils peuvent être utiles dans certaines situations, ce sont des choix que l’on vient parfois à regretter. La sobriété vient avec l’âge…

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