La grenade et sa symbolique
Voici un sujet typiquement ‘Tuyaux de jardin’ qui a tout pour m’enthousiasmer. Le grenadier et la grenade peuvent être abordés tant sous l’angle de la botanique, que de la symbolique, de l’étymologie et de la gastronomie. C’est un fruit qui appartient à la tradition indo-européenne, ancré dans nos cultures depuis la nuit des temps. Aujourd’hui, nous en apprécions plus que jamais les qualités et la résistance.
Un vieux grenadier peut devenir un bel arbre ornemental. Le tronc devient bosselé avec les ans et l’écorce, brun clair à gris, se desquame sur les vieux sujets.
Pour le jardin, on peut aussi opter pour les quelques magnifiques variétés ornementales à fleurs doubles, larges et toutes chiffonnées. Hélas, elles ne portent pas de fruits. Les sélections sont généralement rouges, comme ‘Maxima Rubra’, aussi tape-à-l’oeil qu’une fleur d’hibiscus. ‘Luteum Plenum’ est une alternative jaune pâle de toute beauté.
Du point de vue botanique, le fruit de la grenade est une baie, un fruit charnu contenant les graines. La graine entourée de chair juteuse s’appelle une arille et c’est la partie que l’on mange. Une grenade peut en contenir 200 et plus! Ces graines sont généralement assez dures et peu agréables à manger. De nouvelles variétés à graines tendres ont été développées récemment.
Cette quantité de graines m’amène à l’étymologie du nom. Le nom de genre Punica se réfère au nom que les romains donnaient à Carthage (vous aurez peut-être encore quelques souvenirs scolaires des guerres puniques: Carthago delenda est etc.). C’est toutefois l’épithète granatum, à grains, qui a frappé les esprits et produit les noms communs dans nos différentes langues. Le nom italien de melograno dérive du latin malum (pomme) et granatum. Ceci a donné en vieux français la pomme grenate (pomum désignant un fruit en général) d’où le nom anglais pomegranate. En français on devrait donc avoir une grenate au lieu d’une grenade! La couleur qui en dérive est d’ailleurs la couleur grenat et il existe aussi une pierre précieuse rouge: le grenat. La bombe que l’on dégoupille a quant à elle été nommée par analogie avec la forme du fruit. Contrairement à ce que l’on croit parfois, le nom de la ville espagnole de Granada, Grenade, dérive d’un mot arabe et n’a en réalité rien à voir avoir le fruit.
Tout dans la grenade, sa forme, sa couleur et surtout sa multitude de graines en ont fait un symbole puissant dans de très nombreuses cultures depuis la haute antiquité. On retrouve des grenades dans les tombes égyptiennes et dépeintes sur les fresques de la Vallée des Rois. Les grecs façonnaient des vases en forme de grenade. La couleur évoquant le sang d’Adonis, ils en firent le fruit des morts. L’arbre est présent dans les estampes orientales et le motif est récurrent dans les mosquées des empereurs moghols où au contraire on y voyait l’arbre de la vie. Plus près de nous, les églises baroques italiennes en usent abondamment, au même titre que des grappes de raisin. Toutes les époques ont été sensibles à la forme évocatrice de la grenade.
La grenadine tellement appréciée des enfants était bien sûr à l’origine une boisson à base de jus de grenade, de sucre et d’eau.
Voici cependant la liste des ingrédients de la grenadine d’une bonne marque du commerce: sucre, sirop de glucose-fructose, eau, jus de fruits rouges à base de concentrés 4% (sureau, groseille, cassis, framboise), acidifiant : acide citrique, arômes, antioxydant: acide ascorbique, conservateur : sorbate de potassium. Pas l’ombre d’une grenade…
Vous aurez deviné mon message; cultivez la grenade vous-mêmes ou passez à l’épicerie arabe la plus proche.