Charmants chatons

Eternueurs, larmoyeurs et allergiques de tout type, cet article n’est pas pour vous! Nous allons à la source de vos cauchemars printaniers…

Que sont en définitive les chatons? Il s’agit d’inflorescences, généralement pendantes, parfois dressées, qui n’ont ni pétales ni sépales, de plantes pollinisées par le vent (anémophiles). Les chatons mâles de divers arbres et arbustes portent uniquement des étamines qui vont se couvrir d’un pollen très abondant (à gauche le saule marsault). Ce pollen va former de véritables nuages au moindre coup de vent et aller féconder les inflorescences femelles. La nature déploie ses stratégies pour assurer une pollinisation diversifiée. Dans le cas du saule, la plante est dioïque: il y des arbres mâles qui portent les ravissants chatons soyeux qui vont se couvrir d’étamines et des arbres femelles qui portent des chatons ressemblant à des brosses grises, prêtes à capter le pollen volant. Dans le cas du noisetier, mâle et femelle sont sur la même plante mais ne s’ouvrent pas en même temps. Sur cette photo d’un aulne, on voit clairement les chatons mâles qui pendouillent, les épis femelles dressés et encore fermés et le cônes femelles secs de l’année précédente.

Dans nos contrées, ce sont les noisetiers qui ouvrent le bal des chatons, dès février. Ils se plaisent en bordure de bois, en plein soleil. Autrefois le noisetier ou coudrier était très répandu, pour les noisettes bien sûr, mais aussi pour leurs perches droites, flexibles et solides. Pour les obtenir, les arbustes étaient recépés au niveau du sol à intervalles réguliers.

La floraison très précoce du noisetier est d’une grande importance pour le redémarrage des ruches au printemps. Les abeilles y récoltent de grandes quantités de pollen qu’elles stockent pour fabriquer le ‘pain d’abeilles’, un mélange très complexe à base de pollen, de salive, de propolis et d’un peu de miel. C’est la nourriture des larves. Quand on sait qu’une reine pond jusqu’à 2000 oeufs par jour, il y a vite beaucoup de bouches à nourrir. Sur l’image, on distingue quelques grosses larves blanches et nacrées et des alvéoles remplies de pollens de couleurs différentes.

Préservez donc les noisetiers et leurs fleurs.

Dans un jardin, on peut être tenté par le noisetier tortueux, aptement nommé Corylus avellana ‘Contorta’. La silhouette est particulièrement attrayante en hiver, à condition de bien dégager le tronc et de supprimer des branches trop vigoureuses. En été, couvert d’un dôme de feuilles vertes, l’intérêt est moindre.

Outre Salix caprea, notre saule marsault indigène, les sélections de saules horticoles peuvent avoir des chatons ravissants. J’avoue avoir un faible pour l’étonnant saule japonais à fleurs roses, Salix gracilistyla ‘Mount Aso’.

Les saules, on le sait, aiment les terrains humides et le bord de l’eau. Pour les garder bien denses et profiter de ces pompons roses, il faut les recéper presque au niveau du sol dès la fin de la floraison. Les rameaux coupés peuvent être piqués en terre où ils s’enracinent assez facilement. Ils font merveille dans les bouquets de fin d’hiver.

L’aulne, autre amateur de terrains humides, connaît lui aussi son moment de gloire au printemps alors que son feuillage sombre le rend souvent moins attrayant en été. Les cônes secs qui restent sur l’arbre sont décoratifs en hiver.

Après ces premiers diffuseurs de pollen, d’autres vont suivre: les bouleaux, les peupliers, les chênes, le Taxodium, les frênes et les ormes. Le châtaignier fermera la marche en plein été avec ses très longs chatons en forme de cure pipe. Ils sont eux aussi précieux pour les abeilles et produisent un miel corsé délicieux.

Je voudrais enfin mettre en exergue un arbuste peu courant cultivé pour ses remarquables chatons très précoces: Garrya elliptica. En anglais, cet arbuste s’appelle silk tassel bush, ce qui pourrait se traduire par buisson aux pampilles de soie. C’est une description appropriée pour ce beau persistant qui se couvre de chatons gris argentés. Dans la sélection ‘James Roof’ ceux-ci peuvent atteindre 30cm de long. Très présente dans les jardins anglais, cette plante californienne commence à se répandre sur le continent au gré de nos hivers moins rigoureux. Le feuillage coriace, gris vert et ondulé, ressemble un peu à celui d’un chêne vert. Garrya est certainement un atout pour donner un peu plus d’originalité et un intérêt hivernal le long des murs d’un jardin de ville. N’étant heureusement pas affligée du rhume des foins, je ne suis pas en mesure de juger s’il est allergène.

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