Un fruit barbare

Figue de Barbarie ou poire cactus en français et fico d’India en Italien, le curieux fruit de l’Opuntia ficus-indica s’appelle prickly pear en anglais (poire épineuse). C’est sans doute le nom le plus approprié, car avant d’atteindre la chair juteuse du fruit il faudra ruser avec sa carapace d’épines presque invisibles et affreusement irritantes. On appelle glochides ces épines fines comme de la soie.

Ce fruit est aussi une poire pour la soif; extrêmement désaltérant, sain et nutritif, il est capable de pousser en plein désert. En Europe, les pays du Maghreb, Maroc en tête, en sont de grands producteurs et vous les trouverez en conséquence sur les étals des marchés à cette saison. Septembre et octobre sont en effet les mois de la récolte.

La première difficulté consiste à cueillir le fruit sur le cactus. Cosimino a bricolé un outil pratique, muni d’un long manche, qui permet de se tenir à distance de la bête, de recueillir les fruits et de les déposer dans un seau ou une caisse sans les toucher. Comme vous pouvez le voir, il n’enfile même pas de gants!

Les ‘figues’ doivent être colorées mais pas trop mûres pour un maximum de saveur.

Différentes plantes portent des fruits de couleurs différentes; il y en a des ‘blanches’ (en réalité plutôt vertes, réputées les meilleures), des orangées et des roses ou pourpres. Chaque couleur a une saveur un peu différente.

Si vous les achetez sur un marché, il est probable que ces belles poires aient déjà été débarrassées de leurs épines. Si vous avez fait la cueillette vous même, la première opération consiste à plonger les fruits dans une grande bassine d’eau, de les remuer avec une spatule, de jeter l’eau et de recommencer 2 à 3 fois. L’eau ramollit des glochides et les rend inoffensives.

Dans cette vidéo, Lucia démontre comment peler le fruit: couper les deux bouts, inciser sur la longueur et retirer la partie pulpeuse. Pour les plus prudents, le fruit peut être ouvert avec deux fourchettes.

Les fruits sont maintenant prêts à être mangés mais … ils contiennent d’innombrables graines, jusqu’à 300 par fruit, ce qui n’est pas du goût de tout le monde! En outre, en abuser peut même conduire à une occlusion intestinale. La sagesse populaire interdit d’ailleurs de consommer les figues de Barbarie en même temps que d’autres fruits à pépins, comme les raisins ou les pastèques. Ce qui peut être un problème peut aussi être une solution: deux, trois fruits consommés à jeun avec une bonne quantité d’eau solutionne efficacement les soucis de transit. Mis à part cet aspect sanitaire, la chair est pleine de bonnes vitamines et de couleurs antioxydantes.

Ces nombreuses graines produisent de surcroît l’huile la plus chère au monde! Elle aurait des qualités nettement supérieures à celles de l’huile d’argane et serait une véritable cure de jouvence pour la peau et les cheveux, notamment grâce à sa richesse en vitamines E. Seul problème: il faut une tonne de figues de Barbarie pour produire un litre l’huile…

Pour ma part, je préfère retirer les pépins, ce qui peut se faire avec une centrifugeuse ou, à défaut, avec une simple passoire. Le jus, assez consistant, peut ensuite servir à faire des boissons rafraîchissantes, des confitures, des alcools ou des desserts. Personnellement, je trouve que le sorbet est l’utilisation la plus délicieuse de la figue de Barbarie. Un peu de jus de citron pour relever le goût et un sirop fait de sucre de canne ou de miel et d’eau sont mélangés à la pulpe avant de mettre le mélange dans la sorbetière ou le congélateur. En séparant les couleurs on obtiendra non seulement un bel effet mais aussi une palette de saveurs délicates, rappelant la pastèque ou le melon. Tout un travail mais un dessert de saison qui surprendra les convives les plus gâtés!