Les aloés, le vrai et les autres
Présent dans une vaste gamme de cosmétiques et de remèdes, l’’Aloe vera ou aloé vrai, est connu de tous. Les feuilles de cette succulente contiennent en effet un gel comprenant de nombreux composants actifs. En coupant un bout de feuille, le suc mucilagineux peut être appliqué directement sur la peau pour soulager les brûlures ou les piqûres d’insectes. De nombreux usages médicinaux sont connus depuis l’Antiquité. De par ses propriétés anti-bactériennes et anti-inflammatoires, lAloe vera entre dans la composition de quantités de crèmes. Même le miracle
anti-âge lui est attribué…
La plante aux feuilles charnues et bordées d’épines, vert bleuté, vous est sans doute connue. Par contre, pour avoir la chance de voir émerger la magnifique hampe florale, de décembre à février, il faut un climat au soleil abondant. Cette plante grasse est originaire de la péninsule arabique et requiert de la chaleur et un sol drainant.
Faisant quelque peu penser aux agaves du continent américain, les aloés proviennent exclusivement du continent africain et d’Arabie, de régions arides mais aussi semi-tropicales. Le nom dérive d’ailleurs d’un mot arabe. Le genre Aloe est vaste, comptant environ 650 espèces dont seul un petit nombre sont utilisés dans les jardins.
Planté en pleine terre, un Aloe vera finit par former un tronc court. Certaines espèces peuvent former de petits arbres ramifiés, très graphiques. C’est le cas de Aloe barberae qui a été renommé Aloidendron. Dendron signifiant arbre en grec, ce changement est sans doute justifié.
Dans le maquis sud-africain, le fynbos, les aloés se dressent au-dessus de la végétation, ressemblant à s’y méprendre à de petits palmiers. Il s’agit de l’espèce Aloe ferox aux feuilles bien armées. Comme chez certains palmiers, les feuilles des années précédentes sèchent, durcissent et restent attachées au tronc. Dans un jardin on aura tendance à couper cette ‘jupe’ peu esthétique. Dans la nature ce phénomène joue un double rôle de protection, fruit de l’évolution; ces feuilles constituent une armure face au broutage des grands herbivores et protègent le tronc lors des incendies, réguliers de ce biotope.
Pour le jardin, on recherchera généralement des espèces plus compactes, voire naines. Se reproduisant par de nombreux rejets, certaines forment d’excellents couvre-sols. Les feuillages sont très variés, plus ou moins larges et longs, épineux ou marqués de taches ou de stries. Ces végétaux intrigants peuvent ressembler à des pieuvres ou des étoiles de mer. Certains sont tout à fait remarquables, comme Aloe cameronii, l’aloé rouge de Cameron, rouge vif lorsqu’on le cultive aus soleil.
Un sol bien drainé et un climat chaud sont des prérequis. Une rocaille ou des graviers, au soleil ou à mi-ombre conviendra. La plupart des aloés se cultivent facilement en Méditerranée et font la gloire des jardins sans arrosage. Vérifiez cependant la rusticité à l’achat: elle peut varier de 0 à -7 °C. De nouvelles créations apparaissent dans les catalogues chaque année. La tentation est grande mais beaucoup de ces nouveautés sont gélives et se cultivent exclusivement en pots à mettre à l’abri pour l’hiver.
Ce qui nous séduit particulièrement chez les aloés, se sont leurs fleurs flamboyantes, produites généralement dans les mois d’hiver. Les hampes florales, simples ou ramifiées, se dressent bien au-dessus de la rosette de feuilles. Elles sont composées de fleurs étroites et tubulaires dans les tons rouges, orangés ou jaunes.
Les fleurs de certaines espèces ressemblent aux Kniphofia, appelés communément ‘tison de Satan’. Les deux genres sont de fait apparentés, appartenant tous deux à la famille des Asphodelaceae.
Ces fleurs contiennent un nectar abondant et sont pollinisées par des oiseaux nectarivores comme ce sunbird sud-africain. Ce tout petit oiseau au plumage chatoyant et muni d’un long bec courbe ressemble à s’y méprendre à un colibri. Or les oiseaux-mouches n’existent pas en dehors des deux Amériques.
Nous avons ici un bel exemple d’évolution convergente où deux espèces non-apparentées ont développé des traits similaires car ils doivent remplir le même rôle écologique.
Si le colibri peut voler sur place pour s’abreuver sans se poser, le sunbird qui n’a pas cette faculté s’accroche à la tige solide que lui offre l’aloé; étonnante évolution!
De par leur résistance à la sécheresse, les aloés conviennent pour la culture sans arrosage et sans soucis en pot. Le stress hydrique et l’exposition au plein soleil leur fera prendre des tonalités rouges. Si le climat hivernal n’est pas tout à fait exempt de gel, ces pots pourront être emballés ou mis à l’abri pour les mois les plus froids.
Enfin, pour ceux qui ne peuvent que rêver de ces exotiques il y a heureusement une solution à portée de main: un plant d’’Aloe vera sur l’appui de fenêtre de la cuisine.
Cette plante grasse est décorative mais sera aussi d’un grand secours le jour où un peu d’huile brûlante sautera hors de la poêle …