Laissons les pelouses aux anglais…

Quelles solutions quand il fait trop chaud et trop sec pour de belles pelouses vertes?

Je crois que les consciences écologiques sont aujourd’hui suffisamment développées pour comprendre que de s’obstiner à implanter une pelouse verte dans un climat sec, à grand renfort d’arrosage automatique, n’est pas une bonne idée. Il faut donc chercher des solution alternatives et faire preuve de créativité.

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La bible en la matière est sans conteste le livre d’Olivier Filippi, Alternatives au gazon, paru chez Actes Sud. Filippi est un des pionniers du jardin sec en France, a une pépinière spécialisée près de Montpellier et est l’auteur de différents ouvrages, dont Pour un jardin sans arrosage. L’ouvrage retrace l’histoire du gazon, montre des prairies sauvages époustouflantes du monde entier et présente en détail les plantes tapissantes que l’on peut envisager.

Je ne rêverais donc pas de le concurrencer et me limiterai à montrer quelques tentatives qui ont bien fonctionné dans mon jardin dans le sud de l’Italie.

La première alternative aux déserts verts que sont les gazons, ce sont les surfaces minérales: graviers, sable, pavements divers. Au lieu de la tondeuse il faudra peut-être investir dans une soufflerie ou une brosse et un râteau pour ramasser les dé…

La première alternative aux déserts verts que sont les gazons, ce sont les surfaces minérales: graviers, sable, pavements divers. Au lieu de la tondeuse il faudra peut-être investir dans une soufflerie ou une brosse et un râteau pour ramasser les débris divers. Pour le reste l’entretien est négligeable à condition que les graviers aient été posés sur un géotextile. Ces surfaces mettent en valeur les tons de la végétation. Privilégiez des matériaux locaux: pierres du pays, galets en bord de mer, briques … Autour des parterres vous pouvez veiller à ce que l’eau puisse s’écouler directement des pavements dans les plantes, doublant le bénéfice des rares pluies.

Les arabes ont traditionnellement utilisé des jeux de pavements très intéressants dans leurs jardins. Les trois images ci-dessus ont été prises dans le Jardin secret à Marrakech.

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Restons au Maroc pour une petite plante grasse qui y est fréquemment utilisée pour couvrir de grandes surfaces sur des terrains très secs: le Drosanthemum. Originaire d’Afrique du Sud, elle forme des tapis très denses qui se couvrent au printemps de petites marguerites roses. En pleine floraison printanière certains peuvent trouver ce tapis rose agressif, mais le reste de l’année la floraison est plus éparse. Plantée en haut d’un mur, la plante peut retomber joliment sur plusieurs mètres de longueur.

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Une excellente petite tapissante, bien dense, est l’’Erodium corsicum. Le mot grec erodios désigne le héron et fut attribué pour la forme de la graine qui en évoque le bec. Ce genre appartient à la même famille que le géranium (geranos: la grue) et le pélargonium (pelargos: la cigogne). L’espèce originaire de Corse est une habituée du soleil. Sa croissance est lente, ce qui peut-être une qualité ou un défaut selon les situations.

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Un des couvre-sols les plus charmants est l’;Erigeron karvinkianus. Il suffit de quelques plantes au départ pour se retrouver avec un tapis dense dont on pourra prélever des morceaux pour le propager encore. Cette petite marguerite se ressème partout et aura vite fait de s’insérer dans les moindres interstices des murs, des pavés ou des escaliers. Elle convient donc particulièrement pour donner un aspect un peu spontané entre des dallages. C’est aussi une championne de la sécheresse, ce qui s’explique par son origine mexicaine.

Mon couvre-sol favori, pour son ton de bleu exceptionnel, sa floraison estivale, sa rusticité, sa capacité à supporter soleil ou ombre, sécheresse et négligence, c’est Ceratostigma plumbaginoides. Comme son nom l’indique, elle est proche du Plumbago, d’un bleu céleste, mais n’atteint qu’une vingtaine de centimètres de haut. Le feuillage peut virer au pourpre avant de tomber en hiver. Cette plante, qui n’atteint que 20 cm de hauteur, se répand assez rapidement par stolons, toujours un avantage pour couvrir de grandes surfaces.

Il y a un grand nombre de variétés de thyms et beaucoup conviennent pour couvrir les sols secs, comme ils le feraient dans leur habitat naturel. Renseignez-vous sur leur floraison, le plus souvent blanche ou rose, et leur hauteur. L’avantage de certaines variétés est qu’elles sont si rases qu’elles peuvent être piétinées (modérément!). On peut aussi alterner des grandes dalles et du thym. Leur parfum exquis et leurs qualités mellifères sont deux autres raisons de les introduire au jardin. Le nec plus ultra en la matière est le jardin des thyms du Prince Charles d’Angleterre, réalisé dans son jardin de Highrove. Pour vous en inspirer cherchez Thyme Walk, Highgrove sur Internet. On y voit même le Prince planter un potiquet de thym de ses propres mains! Je n’ose pas en reproduire les images ici…

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Volontaire, prête à partir à l’assaut des escaliers de pierre, il y a Persicaria capitata. L’épithète fait référence aux toutes petites têtes de fleurs roses de l’espèce. Le feuillage est raffiné et la plante reste vraiment au ras du sol. Si elle se plaît elle apparaîtra spontanément à divers endroits.

Pour un tapis dense et toujours vert, à l’ombre au pied des arbres où forcément il fait affreusement sec, rien ne vaut Muehlenbeckia axillaris. Pour le nom de genre compliqué on peut remercier le médecin français du 19ème siècle Muehlenbeck. Axillaris fait référence au fait que les petites fleurs très discrètes poussent à l’aisselle (axil) des tiges. Cette rampante, qui peut même être utilisée comme grimpante, notamment sur le tronc d’un arbre, a de multiples qualités. Chaque plant formera très rapidement une touffe de 1m de diamètre sur maximum 40 cm de haut. Elle se divise très aisément, ce qui permet de couvrir à moindre frais de grandes superficies en quelques années. Aucune mauvaise herbe ne réussira à lui faire concurrence. Sa provenance, montagnes de Nouvelle-Zélande et d’Australie, la rend même relativement résistante au froid, jusqu’à -12 °C environ. C’est une exotique, venue de l’autre bout du monde, mais pour ceux qui veulent un tapis vert, c’est certainement une solution magnifique. Au moins Muehlenbeckia ne se transformera pas en paillasson à la première canicule!

Sous une plantation d’orangers et des mandariniers j’ai trouvé une solution éclatante: un tapis de lantaniers rampants jaune vif. L’idée de départ était que les arbres seraient couverts de beaux fruits oranges tout l’hiver et que le même ton se trouverait à leur pied tout l’été. Les lantaniers les plus connus forment de gros arbustes dont les jolies rosaces de fleurs ont souvent plusieurs tons Ici, ce sont les variétés rampantes qui nous intéressent mais on se heurte à un problème de noms, les trouvant sous Lantana montevidiensis, L. sellowiana ou L. camara ‘Repens’. Les lantaniers sont des verbénacées originaires d’Amérique du sud, mais qui semblent avoir conquis une grande partie du monde, étant même considérés comme peste envahissante dans certaines régions. Ils ont le mérite d’avoir une résistance exceptionnelle à la sécheresse, une fois installés, et de supporter malgré tout de légères gelées, étant caducs en hiver. Chaque plant monte jusqu’à 60 cm environ et s’étale sur un bon 2 m. Le bouturage est facile et ici aussi, avec quelques années de patience et de reproduction maison, on peut couvrir une grande superficie comme je l’ai fait. L’effet peut aussi être spectaculaire quand plantés en haut d’un mur. A la sortie de l’hiver il suffit de retailler la plante sévèrement. Une floraison quasi ininterrompue de mai à novembre, un festin pour les papillons, une sobriété remarquable (une fois établis); il y a peu de plantes à fleurs capables d’en offrir autant. Sauf que … vous n’aimez pas le jaune? Je vous rassure, pour les timorés il existe une espèce blanche et une violette, un peu moins florifères toutefois.

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