Le calendrier de la prairie fleurie

La prairie fleurie est quelque chose dont chacun rêve, qui semble simple et naturel, mais qui dans la réalité ne l’est pas du tout. Dans certains environnements protégés, en montagne par exemple, on trouvera des fleurs des champs magnifiques. Réaliser la même chose dans son jardin est un autre programme! Le principal problème est que le sol de son jardin est généralement trop riche et que les plus belles floraisons, contrairement à ce que l’on pourrait croire, apparaissent sur les sols les plus pauvres. Pour ne pas être déçus, ne placez pas vos attentes trop haut. L’objectif principal est de créer un refuge pour la biodiversité. A titre d’exemple, voici l’évolution de ma prairie de mois en mois.

JANVIER

Les rayons bas d’un soleil hivernal caressent les herbes légèrement givrées. Pour installer une prairie de plantes vivaces, choisissez un emplacement où vous pouvez accepter visuellement cet enchevêtrement d’herbes et de fleurs fanées pendant les 3 mois d’hiver. Dans notre cas, il s’agissait d’un terrain où un vilain grand bâtiment de ferme a pu être détruit. Le sol en dessous était donc pauvre et a été simplement égalisé, sans aucun apport de terre de jardin. Dans un coin de la prairie, nous avons creusé une petite mare qui permet un certain drainage.

FEVRIER

Chacun sait qu’une prairie naturelle en fleur est un trésor pour les butineuses, mais il est essentiel de ne pas la faucher avant l’hiver. Une quantité d’insectes y trouvera un refuge pour passer la mauvaise saison parmi les fleurs séchées. Les coccinelles aiment notamment se cacher sous les capitules des grandes achillées. Un dernier givre met en valeur les gousses séchées des lupins dont les graines sont tombées à l’automne, laissant d’excellents abris pour les perce-oreilles.

MARS

Fin février, début mars, après les dernières gelées, le moment est venu de faire place nette. Notre jardinier revêt son casque et taille toute la prairie à la débroussailleuse, en veillant à ne pas descendre trop au ras du sol pour ne pas endommager les rosaces des plantes vivaces. Idéalement, il conviendrait de retirer tout le matériel coupé dans le but de ne pas enrichir le sol. Je dois avouer que nous ne le faisons pas.

Mars peut aussi être le moment d’ajouter l’une ou l’autre plante vivace, surplus du jardin par exemple, ou de jeter quelques semences supplémentaires.

AVRIL

La repousse a commencé! Les plants de lupins se développent rapidement. A un moment donné, j’ai jeté des graines de myotis du jardin à la volée. Ils reviennent par-ci, par-là, chaque année. Bien qu’étant plutôt des annuelles, elles sont très naturelles et volontaires et se ressèment abondamment. Jusqu’à présent je n’avais pas ajouté de bulbes à l’ensemble, mais je viens de planter des Camassia quamash, bulbes des prairies américaines qui pourraient se naturaliser. Tout l’amusement est de pouvoir faire de nouvelles expérimentations, même si le succès n’est pas nécessairement garanti.

MAI

Mai est le mois des marguerites, un grand classique des prairies fleuries. Ce tapis blanc est frais et charmant. Apparaissent aussi les premiers boutons d’or et les achillées millefeuilles. Plus étonnants car ils ne font pas partie de notre flore sauvage, des oeillets de poète, Dianthus barbatus, se sont solidement installés. Au départ, sur la terre nue, j’ai semé à la volée des sachets de mélanges pour prairies fleuries. J’ai veillé à choisir des mélanges de plantes vivaces et non pas d’annuelles pour assurer la pérennité de la prairie. Certains rêvent d’un champ de coquelicots mais, si le spectacle peut-être époustouflant la première année, la déception sera au rendez-vous par la suite. Ces annuelles perdront vite le combat contre les graminées et les herbacées.

Une entreprise belge s’est spécialisée dans les semences de fleurs sauvages et la restauration de milieux naturels. Je vous conseille vivement leur site ecosem.be. Ecosem propose des mélanges de tous types, adaptés à votre climat, à votre sol et répondant à vos objectifs précis.

JUIN

Les lupins de différents ton dominent maintenant le tableau, un spectacle grandiose! Au départ j’ai planté une dizaine de plantes en pot. Les limaces sont très friandes de ce genre de plantule encore fragile et j’ai eu la chance qu’elles échappent à leur appétit. Quelques années durant j’ai recueilli les grosses graines et les ai jetées plus loin. Depuis, le processus n’a plus aucun besoin de mon intervention. Je me contente de cueillir de grandes brassées pour les bouquets.

JUILLET

Originaire des prairies de l’est des Etats-Unis, Rudbeckia fulgida commence à fleurir en juillet et poursuit sa floraison jusqu’en octobre. La plante se reproduit par stolons et semences. Ces soleils or ou orangés sont très réjouissants. Une fois les pétales tombés, les cônes noirs du coeur de la fleur restent très décoratifs, notamment pour les bouquets secs. Les rudbeckias sont très mellifères, comme par ailleurs les chardons, inévitables dans ce genre de plantation.

AOÛT

Cela bourdonne ferme à la fin de l’été. Les butineurs ont un large choix. Les centaurées des champs violettes les attirent particulièrement. Voici venu le moment de faire une belle cueillette de fleurs à sécher. La grande achillée jaune, Achillea filipendulina, dont les tiges fortes et droites peuvent atteindre 1,20m, est idéale. La couleur jaune or se conserve parfaitement au séchage. Cette vivace forme de larges touffes avec un beau feuillage rappelant les fougères. La floraison s’étend de juillet à octobre mais sa présence hivernale est tout aussi majestueuse.

SEPTEMBRE

Les graminées ont maintenant pris le dessus; ce serait le moment de faire les foins en fauchant. Les semences sont mûres et les plantes peuvent se ressemer. Dans la gestion de certaines prairies, c’est le moment où on y lâche des moutons par exemple pour tondre les plantes et enfouir les graines avec leurs sabots. Dans le cas présent, tout est conservé comme réservoir de nourriture et abri hivernal.

OCTOBRE

Nous en sommes aux dernières floraisons. L’achillée millefeuille, très solidement implantée et qui s’étend par stolons, offre souvent une seconde floraison. Le chardon est malheureusement très bien conçu pour répandre ses semences au loin.

NOVEMBRE

Les brumes matinales de l’automne apportent le mystère dans la prairie défleurie. C’est alors que l’on voit que l’espace grouille encore de vie, notamment d’araignées dont les toiles sont drapées d’une tige à l’autre, captant les gouttelettes de brouillard. La fanaison a son charme propre…

DECEMBRE

Après l’humidité vient le gel. Quand un givre abondant repeint la scène en blanc monochrome, on ne regrette pas une seule seconde de ne pas avoir fauché sa prairie à la sortie de l’été! Un peu de patience encore et la couleur reviendra.

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