Honneur aux houx

Nos forêts du centre de l’Europe ne comptent que très peu d’espèces indigènes à feuillage persistant. En réalité il n’y a que le lierre, l’if et le houx. Les épicéas proviennent des zones boréales et de la haute montagne et les pins poussent plus au sud. Il n’est donc pas étonnant que nos ancêtres des peuples germains vénéraient le houx. Au moment du solstice d’hiver, les rameaux de houx, parfois tressés en couronnes pour orner les maisons, symbolisaient la persistance de la vie et le retour de la lumière. Cette belle tradition s’est heureusement perpétuée, malgré les piques.

Ilex aquifolium et ses hybrides

Le houx commun est très piquant, surtout les feuilles des branches basses, une défense contre les brouteurs à la recherche de quelque chose de vert à se mettre sous la dent en hiver. C’est Linné qui établit le nom scientifique, reprenant le nom latin du chêne vert, Ilex, (aujourd’hui Quercus ilex) pour la similitude de la feuille, avec l’adjectif aquifolium, à feuille épineuse. En vérifiant l’étymologie, je suis tombée sur un mot amusant: le terme houspiller voulait à l’origine dire ‘battre avec un balai de houx’! Bigre…

Notre houx indigène pousse en sous-bois, à l’ombre ou à mi-ombre. Il est d’une grande résistance aux aléas du climat et peut vivre très vieux. Laissé à lui même il peut atteindre 8 m de haut. La plante est dioïque, avec des sujets à fleurs mâles et d’autres à fleurs femelles. Seules ces dernières portent les jolis fruits, très appréciés des oiseaux dont les rouge-gorge, les grives et les merles. De tous temps, le houx a été utilisé en haie, un ancêtre du barbelé. En angleterre, où les haies ont été préservées, on peut en voir de très anciennes. Le houx se prête en effet parfaitement à la taille. Les jeunes pousses bronze des sujets taillés sont très décoratives au printemps.

Les baies rouges font Noël, je l’admets, mais il faut savoir qu’il existe une magnifique version à baies jaunes: Ilex aquifolium ‘Bacciflava’ (du latin baccus, baie et flavus, jaune). Cette sélection très ancienne est un peu tombée dans l’oubli mais est vraiment décorative.

De nombreux cultivars de Ilex aquifolium se trouvent en pépinière. Beaucoup sont panachés de blanc ou de jaune, ce qui permet d’apporter un peu de lumière dans un coin sombre (à moins que l’on ne déteste les plantes bicolores …). Pas tous ne produisent des baies, à moins d’avoir des plantes femelles ou autofertiles. Mieux vaut se renseigner.

Le cultivar ‘Argentea Marginata’, est le grand classique, avec la feuille typique simplement bordée de crème. ‘Silver Milkboy’ est nettement moins courant, avec le coeur du limbe crème et le bord vert. Il a le mérite d’être bien moins hérissé de piquants. Le plus méchant de tous sous cet aspect est le bien nommé ‘Ferox Argentea’, un véritable oursin! Quasiment sans épines, le très beau ‘Golden King’ est un hybride d’Ilex aquifolium: Ilex x altaclarensis. Il a la vigueur de l’hybride, des feuilles un peu plus grandes et une belle densité. La plante est femelle (ce devrait être une Queen..) et fructifie pour peu qu’il ya ait un mâle dans les parages, qui peut être un houx commun.

De nombreux hybrides ont été développés à partir du houx commun, à la recherche de qualités particulières. De la sorte, les Ilex x meserveae sont des créations américaines destinées à résister aux grands froids. Elles se distinguent par des feuilles plus souples, très foncées, un peu bleutées même, et des tiges pourpres. ‘Blue Princess’ porte de très belles baies rouge foncé. ‘Blue Prince’ , que l’on voit ici avec ses fleurs mâles et joliment givré, est actuellement la variété qu’on vous proposera en premier choix pour une haie. Cette variété mâle est un bon pollinisateur pour les autres espèces.

Dans les houx totalement sans épines, un sujet de choix est Ilex x altaclerensis camelliifolia, le houx à feuille de camélia. La feuille est effectivement totalement lisse et verte comme une feuille de camélia. L’arbuste a naturellement une belle forme pyramidale, qui peut être travaillée en cône parfait si on le souhaite. Ici aussi il s’agit d’une sélection femelle.

Ilex x koehneana ‘Chestnut Leaf’ est un autre hybride de aquifolium tout à fait remarquable. Le feuille, d’un beau ton olive, est beaucoup plus grande que celle des autres houx et ressemble effectivement à la feuille du châtaignier. La fructification est abondante. Ce houx à feuille de châtaignier forme un petit arbre qui peut atteindre 8m de haut tout en restant étroit. A ce titre il est occasionnellement utilisé comme arbre de rue. Un bon choix car il résiste à la sécheresse et à la pollution. De plus, n’y aura rien à tailler, pas de feuilles à ramasser et, en bonus, des baies pour les oiseaux pour peu que la ville en héberge encore.

Ilex crenata

Ici nous entrons dans une catégorie d’arbustes qui ne répondent pas du tout à l’idée que nous nous faisons du houx: les feuilles sont toutes petites, claires et lisses. Les baies, s’il y en a, sont noires. En réalité les Ilex crenata ressemblent nettement plus à un buis ou à un Lonicera. Ils ont la cote pour l’instant et les pépinières en sont pleins pour satisfaire les clients qui arrachent leurs haies de buis à tour de bras. Ces houx à petites feuilles peuvent offrir une alternative. Ils sont cependant très vigoureux et dans la nature atteignent les 8 mètres. ‘Green Hedge’, ‘Dark Green’, ‘Caroline Upright’ et ‘Glory Gem’ sont quelques unes des variétés proposées. Je ne m’attarderai pas sur cette espèce, qui est un sujet en soi.

Ilex verticillata

Revenons à l’ambiance de Noël avec un houx très particulier qui est devenu très tendance chez les fleuristes: le houx caduc. Ilex verticillata est originaire de l’Est des USA et du Canada où on l’appelle snowberry. Avec une feuille elliptique vert clair en été, l’arbuste a un aspect somme toute assez ordinaire. En revanche, une fois les feuilles tombées, les baies restent sur les branches tout l’hiver, ce qui est du plus bel effet.

Ne vous enthousiasmez pas trop pour planter ce houx caduc au jardin. Ici aussi, il y a mâle et femelle et il faut de plus que leur floraison soit synchronisée. Vous trouverez difficilement une plante mâle en vente, puisqu’elle n’a aucun autre intérêt que de servir de pollinisateur.

Moralité: laissez cette espèce de houx aux américains car chez eux elle pousse sauvage. Pour le même effet, prenez une branche de notre chez bon vieux houx commun et épluchez patiemment les feuilles pour mettre les baies en évidence.

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